Comment fabriquer un saucisson sec fermier ? La fabrication du saucisson sec fermier est divisée en différentes étapes : La préparation de la viande Comme il est indiqué dans la définition des produits fermiers, la matière première (la viande de porc) provient exclusivement de l’exploitation agricole. 54 % des producteurs utilisent de la viande de porcs lourds ( poids carcasse supérieur à 120 kg), 34 % d’entre eux utilisent de la viande de porcs charcutiers (poids carcasse inférieur à 120 kg) et 12 % de la viande de coches (femelles d’environ 191 kg). 33% des producteurs ont des pratiques particulières héritées d’un savoir-faire ancien et ne contrôlent pas le taux de gras présent dans la viande de porc. En effet, ces producteurs ne trient pas le gras du maigre lors de la découpe des carcasses. Le taux de viande grasse et maigre est donc très variable. Le reste des producteurs ayant des pratiques plus courantes, contrôlent le taux de gras en triant le gras du maigre lors de la découpe. Les quantités de viande maigre et grasse sont alors pesées. Le taux moyen de gras du mélange de viande est environ de 18 % (3 à 34 %) mais il existe une forte variation selon les producteurs. Comparons avec les saucissons secs industriels ! Lors de la fabrication des saucissons secs industriels, la viande maigre et grasse est triée puis pesée dans des proportions précises. En général,la viande utilisée pour la fabrication du saucisson contient environ 70% de maigre et 30% de gras Hachage Les différentes proportions de viande grasse et maigre sont mélangées puis hachées. La majorité des producteurs pratiquent un hachage suivi d’une homogénéisation afin de mieux maîtriser la grosseur des grains de viande. En effet, selon le calibre de la grille utilisée, le hachage sera plus ou moins épais en fin de production selon le type de saucisson désiré. Hachoirs artisanaux Différentes pièces d'un hachoir Lorsque les grains sont fins (cas du salami), le saucisson a un aspect relativement homogène, tandis que lorsque le hachage est plus grossier (plaque avec des ouvertures de 7 à 8 mm, cas des saucissons secs fermiers du Massif Central, rosette), on peut voir les morceaux de viande, le gras et les épices (poivre…). Seulement 16 % des producteurs pratiquent le cutterage, nécessitant une bonne maîtrise de la technique. Dans ce cas, la viande est malaxée à l’aide de cutters dans un grand bol de malaxage ou un mixeur géant. A la fin de cette étape, le mélange de viande hachée est appelé la mêlée. Comparons avec les saucissons secs industriels ! Le hachage va se faire dans des hachoirs automatiques de calibres bien définis. La viande sera amenée directement à la machine par l'intermédiaire d'un tapis ou d'une colonne élévatrice. La productivité de cette machine sera très élevée et aura une grande précision de coupe. Ajout d’ingrédients et d’additifs Les ingrédients : Tous les producteurs ajoutent du sel et du poivre conformément à la définition du saucisson sec pur porc. Les saucissons secs fermiers ont un faible taux de sel, environ 25,5 g/kg de mêlée. Auparavant, le sel était d'avantage utilisé pour conserver le saucisson en inhibant le développement de micro-organismes. Aujourd’hui, le sel est plutôt utilisé comme agent de goût et agent technologique. En effet, le sel solubilise les protéines (qui coagulent suite à l’acidification de la mêlée, donnant une cohésion au produit). Concernant l’assaisonnement, près de 80 % des producteurs utilisent de l’ail, 35 % ajoutent du vin, 8 % utilisent des épices. Conformément à ce qui est préconisé pour la fabrication des saucissons secs fermiers, 86 % des producteurs n’ajoutent pas de ferments (flore microbienne) dans la mêlée. En effet, la fermentation va être réalisée grâce à la flore microbienne naturelle présente dans la matière première ou viande, mais aussi dans les boyaux utilisés et dans l’environnement de l’atelier de fabrication. La flore naturelle est variée et va donc conduire à produire une grande diversité de saucissons secs fermiers. Seulement la moitié des producteurs ajoutent du sucre dans la mêlée. Le sucre est une source d’énergie nécessaire au développement des bactéries. L’absence de sucre dans les mêlées va conduire à un faible développement de la flore naturelle du saucisson pour aboutir à un produit peu acide. Préparation des différents ingrédients Ajout de sel à la mêlée Les additifs : Le salpêtre ou nitrate de potassium se présente sous la forme d’une poudre blanche. Seulement 25 % des producteurs l’utilisent pour donner une couleur blanchâtre en surface des saucissons. Il peut être également ensemencé dans la mêlée où il participe à une meilleure conservation du saucisson. Comparons avec les saucissons secs industriels ! - Utilisation d’une quantité plus importante de sel : 28 à 35 g/kg de mêlée - Ajout de ferments sélectionnés à la mêlée - Ajout systématique de sucre, donc acidification des saucissons plus prononcée - Utilisation de conservateurs (nitrates E252, nitrites E249 et E250) Embossage L’embossage est le fait de « pousser » la mêlée dans un boyau naturel. Il faut une peau suffisamment épaisse et solide pour éviter qu’elle n’explose lors du remplissage. Il faut également que la peau soit suffisamment fine et perméable pour permettre au saucisson de sécher. Les boyaux sont lavés, dégraissés, puis gonflés pour en vérifier l’état et la taille. Ils sont ensuite salés pour permettre leur conservation et une des extrémités est fermée à l’aide d’une ficelle. Le boyau est alors dessalé et remplit, on dit que la mêlée y est embossée. Puis il est ficelé à l’autre extrémité avant étuvage. Dessalage des boyaux de porc Nettoyage des boyaux de porc 90 % des producteurs n’ensemencent pas la surface extérieure des boyaux avec des micro-organismes. Par conséquent, les levures et les moisissures présentes dans l’atelier de fabrication pourront coloniser cette surface. Ceci explique l’aspect extérieur verdâtre ou grisâtre si particulier des saucissons secs fermiers. Comparons avec les saucissons secs industriels ! Ils peuvent être embossés dans des boyaux synthétiques comestibles fabriqués à base de collagène pour remplacer les boyaux naturels de porc. Les boyaux de cellulose, quant à eux, ne sont pas comestibles. Les saucissons secs industriels sont additionnés de salpêtre en surface des boyaux, ce qui leurs donnent un aspect extérieur blanchâtre. Egouttage – Etuvage Ces deux étapes sont combinées en une seule dans le cas de la fabrication fermière. Ici, la température de la phase d’égouttage - étuvage est basse et sa durée est importante. On peut considérer qu’il s’agit d’un égouttage long et qu’il n’y a pas d’étuvage pour la fabrication des saucissons secs fermiers. L’égouttage consiste à stocker le saucisson dans une pièce à forte humidité (80 à 85 % d’humidité) à environ 10°C pendant 2 jours. Durant cette étape, l’augmentation de l’acidité (pH compris entre 5,6 et 5,7) et la perte d’eau permettent aux grains de la mêlée de se lier entre eux. De plus, les micro-organismes se développent peu puisque la durée de cette étape est assez courte par rapport à la durée d’égouttage - étuvage des saucissons secs industriels. Par conséquent, l’acidité sera faiblement prononcée. Comparons avec les saucissons secs industriels ! L’égouttage et l'étuvage sont deux étapes distinctes dans le cas de la fabrication industrielle. En effet, l’égouttage consiste à stocker les saucissons pendant 24 heures à une température comprise entre 10 et 15°C. Ensuite, vient l’étuvage où les saucissons sont conservés pendant 3 à 6 jours entre 22 et 25°C. Les principales différences avec la fabrication fermière sont la température (plus élevée) et la durée. De plus, l’acidité des saucissons secs industriels est plus élevée (pH = 5,2) en fin d’étuvage. Ceci est dû à une température plus élevée et un temps de stockage prolongé lors de l’étuvage favorisant le développement des bactéries lactiques et donc l’acidification. Séchage Cette étape est importante pour la conservation et le développement de la flaveur des saucissons secs fermiers. Le séchage consiste à stocker le saucisson à environ 12°C avec un pourcentage d’ hygrométrie de 83 % pendant au moins 7 semaines. La durée de stockage est longue pour les saucissons secs fermiers, car en absence de ferments ajoutés, il faut plus de temps pour permettre le développement des micro-organismes. Ces derniers réalisent la fermentation et apportent une flaveur caractéristique aux saucissons. De plus, la durée de séchage est longue pour atteindre une baisse de l’activité de l’eau suffisante (eau disponible pour les micro-organismes) pour stabiliser le produit. Ainsi, il peut être évité tout risque alimentaire en limitant la croissance de germes pathogènes pour l’homme. Le séchage peut également être réalisé dans des séchoirs dits « naturels » où la température et l’hygrométrie ne sont pas contrôlées. Avec cette méthode, la durée de séchage va être allongée par rapport à l’utilisation d’un séchoir climatisé où la température et l’hygrométrie sont contrôlées. Cette dernière étape de fabrication caractéristique du saucisson sec fermier va lui conférer un goût et un aspect particulier le distinguant du saucisson sec industriel. Comparons avec les saucissons secs industriels ! La différence majeure porte sur la durée du séchage, 3 à 6 semaines pour les saucissons secs industriels, contre au moins 7 semaines pour les saucissons secs fermiers. Pour le saucisson sec industriel, le séchage se fait à une température plus élevée, de 12°C à 16°C, à une hygrométrie plus basse, 75 à 85 %. Ces paramètres seront contrôlés très précisément.